(v2.1)Présentation de Tsunade [6eme division]

~~Le grand Bilan ~~.

La porte s’écarta en un grincement sinistre, laissant un rayon de lumière balayer le sol de la pièce. Le nuage de poussière qui s’éleva dans les airs témoignait du temps écoulé depuis la dernière fois que mes pieds avaient foulés ce sol. Cette pièce me servait de foutoir attitré, ce n’était plus un secret pour personne. Ce qui était plus confidentiel, en revanche, c’était que parmi les innombrables cartons d’archives diverses présents dans cette salle, l’un d’entre eux contenait plus d’informations concernant ma vie privée que nul être vivant n’en lirait jamais. Une mine d’or personnelle que j’avais délibérément choisi d’enfouir loin de moi, sous une quantité de rapports insignifiants, afin de prendre du recul. Ces 50 années d’existences que j’avais derrière moi, je ne voulais plus les traîner comme un fardeau. Il y avait du bon, et du mauvais. Trop de mauvais à mon goût pour que je le ressasse sans cesse. Depuis ma nomination en tant que Godaime Hokage, j’avais enfermé ces documents ici, dans cette pièce inviolée depuis, afin d’entamer une nouvelle existence.

Un an s’était écoulé depuis, et pour certains souvenirs, il était temps de refaire surface, le temps d’une nuit, avant de sombrer à nouveau dans l’oubli. C’était un rite, un acte purgateur nécessaire. Je ne mis que peu de temps à retrouver ce que je cherchais. Parmi tous ces cartons pleins à craqués de documents, un seul parvenait à attirer mon regard comme si mon âme elle-même y était contenue. Je l’ouvrai délicatement, alors que mon regard se posait sur une enveloppe au papier jauni par le temps. Cette fameuse lettre que j’avais du lire des centaines de fois, comment pouvais je l’oublier…

Je pris l’enveloppe entre mes doigts, l’ouvrant délicatement, avant de caresser son contenu : une vieille photo jaunie, et une lettre manuscrite qui portait elle aussi les marques du temps.

Chapitre 1- Au commencement.

Voilà près de 42 ans que j’avais lu cette lettre pour la première fois, et pourtant, elle parvenait toujours à me prendre au cœur comme aux premiers jours. Shodaime Hokage, que j’avais coutume d’appeler Papy à l’époque, avait certainement été la personne la plus présente pour moi dans ma basse enfance. Lire après tant de temps ces quelques mots, c’était comme le faire revivre durant quelques secondes. En un profond soupir, je remis la lettre à sa place, aussi délicatement que s’il s’était agit du trésor le plus précieux au monde. Mon regard fut alors attiré par un petit livret en piteux état, et je savais pertinemment ce qu’il contenait. Ma main tressaillit, tandis que j’en ouvrais la couverture… Sur l’une des toutes premières pages, je reconnu sans grand mal l’écriture grossière et a peine lisible qui caractérisait ma main à l’époque…




A la lecture du nom de Naoki, je tressaillis. La douleur fantôme qui m’habitait depuis sa mort ne disparaîtrait probablement jamais. Toutes les personnes que j’évoquais dans cette lettre étaient mortes depuis bien longtemps, de toute manière. Enfin, toute sauf une, a peine évoquée, qui était malheureusement la seule que j’aurai bien voulu savoir morte en ces heures de pré guerre…

Je continuais ma lecture, redécouvrant avec une nostalgie certaine ces souvenirs d’autrefois.



Au cours de ma lecture, je pouvais constater l’évolution progressive des semaines suivantes. Au fil des notes, je perdais en enfantillages, et gagnait un peu de sérieux, à tel point que les messages laissés a peine cinq semaines plus tard n’avaient plus rien à voir.



Les pages qui suivaient étaient toutes du même genre. Je me demandais en relisant ceci si Sarutobi se serait donné autant de mal à nous instruire s’il avait su à l’époque ce que deviendrait Orochimaru, qui était à n’en pas douter son disciple favori. Enfin, c’était le genre d’interrogation qui n’avaient pas lieu d’être, simplement parce que personne ne pourrait jamais y apporter de réponse.

La prochaine entrée intéressante était bien plus tardive, écrite 6 mois après le début de l’entraînement avec celui qui deviendrait Sandaime. Elle témoignait d’un évènement bouleversant, pas seulement dans mon existence, mais dans celle de bien du monde. Le passage du duo compétitif au trio dynamique s’était fait attendre, mais il en valait largement la peine.

Pour sur, s’il y avait bien une chose pour laquelle Jiraiya était doué à cette époque là, c’était bien d’ouvrir sa gueule. Je laissais un sourire pincer mes lèvres tandis que je me remémorai avec plus de précision que jamais le lendemain, quand Sarutobi m’avait forcé pendant des heures à enseigner la maîtrise du chakra à celui qu’a l’époque je considérai comme un gros benêt, et qui me le rendait bien, à sa manière. Enfin, il avait beau me traiter de planche à pain, je finissais souvent par avoir le dessus, là aussi à ma manière, et je tenais entre mes doigts la preuve formelle de ce que j’avançais.



La première page d’une longue série. Je me souviens encore avoir perdu tellement de temps à écrire ces lignes, tandis que Jiraiya recopiait ses « Je n’insulterai plus les membres de mon équipe », que Sarutobi sensei fini par se lasser et nous donner en guise de punition des exercices ninja, afin de ne pas trop freiner notre progression. Bien entendu, la compétition entre nous trois était telle à cet instant que ce n’était plus vraiment une punition, et je ne compte plus le nombre de fois où Jiraiya avait volontairement provoqué une discorde avec Orochimaru pour écoper d’un exercice supplémentaire, « défi » à ses yeux. Comme témoin de cette époque qui forgea notre caractère, quelques lignes écrites d’une main lourde et parcourue de courbatures.



Finalement, je me souviens n’avoir pas tenue ma promesse. Pas par pitié ni quelconque trace de compassion, mais parce qu’au moment ou je maintenais la tête de Jiraiya sous l’eau, Sarutobi s’est encore plus énervé et que pour mettre fin à nos querelles il nous à tous renvoyé chez nous… Je crois que c’est la pire des punitions qu’il ne nous ait jamais imposé.
C’est ce jour là, alors qu’il faisait un temps magnifique et que j’étais coincée chez moi, que j’ai compris qu’Orochimaru et Jiraiya me manquaient. Eux, leurs railleries, leurs disputes incessantes… et même les courbatures. J’avais du temps libre, et pourtant la seule idée que j’avais en tête, c’était de les retrouver au plus vite le lendemain pour vivre une nouvelle journée à leurs côtés.

La team 1 était née. Loin d’être la légende qu’elle est aujourd’hui, elle jouissait déjà d’une certaine réputation. Beaucoup moins flatteuse.



Alors que je tournais la page du journal, une photo en glissa, se déposant sur le sol poussiéreux. Elle était face cachée, et pourtant, sans même la retourner, je pouvais déjà en deviner les traits, les couleurs estompées, et le dessin de nos visages souriants et pleins d’espoirs infantiles. Je la ramassais, la reposant avec délicatesse dans la rainure du journal miteux.



C’était un très vieil agrandissement de la photo de groupe de toutes les nouvelles équipes genin lors de la cérémonie d’investiture. Nous avions reçus nos bandeaux frontaux ce jour là. Sarutobi nous avait expliqué le rôle protecteur du bandeau frontal en cas d’attaque armée au niveau du crâne. Cela n’avait pas découragé Orochimaru dans son refus de l’arborer. Il disait se sentir mal à l’aise avec l’insigne de Konoha gravée sur le front. En réalité, porter ce bandeau signifiait reconnaître son allégeance à la masse dont Orochimaru cherchait tant à se démarquer, déjà. Tant de signes avant coureur, et nous n’avions pourtant rien vu venir…
Plus pour ne pas perdre la face à son rival que par conviction profonde, Jiraiya refusa aussi de le porter. Il disait que le courage, c’était affronter son adversaire nu s’il le fallait. A l’idée d’un Jiraiya nu comme un vers qui se tenait face à un ninja ennemi je ne pu réprimer un fou rire, et je décidais de laisser tomber moi aussi le bandeau frontal. Non par effet de groupe, mais simplement parce qu’a mes yeux, il symbolisait notre appartenance à un groupe. Et mon groupe, il était déjà là, sous mes yeux. Il existait bien avant la remise de ce bandeau, et continuerai à exister sans ce dernier. C’était notre identité.

Le bandeau. Il se trouvait là lui aussi, dans ce vieux carton corné et rapiécé. Sa surface striée en plusieurs points témoignait de son usure, car contrairement à ce que je pouvais croire quand j’avais 8 ans, il avait fini par servir. Beaucoup. Assez pour que je me souvienne avec écoeurement que la forte odeur de fer qu’il dégageait n’était en rien liée à sa composition métallique. L’insigne de Konoha gravée sur la plaque était pourpre. Trop de sang avait infiltré la gravure pour que je ne parvienne à m’en débarrasser. D’autres traces maculaient ce symbole de fierté et d’appartenance, mais elles m’évoquaient un souvenir qu’il était hors de question pour moi d’aborder en cet instant précis. L’ordre des souvenirs se devait de régir le chaos de mes émotions…


On en revenait à d’autres photographies prises à la va vite lors d’un entraînement que je n’étais pas prête d’oublier…Je me souviens encore avoir longuement remercié le type qui avait prit ces photos ce jour là. Non pas que je me trouve adorable dessus, mais parce qu’il s’était avéré très utile…



En cet instant de mon introspection, je me surpris à rire. En vrac parmi tant d’autres souvenirs, mes supers plans d’attaques.

Spoiler:

Derrière ces ridicules graffitis se masquaient de nombreuses missions accomplies avec succès (pour être franche ces plans d’actions n’étaient pas souvent mis à l’œuvre, trop d’objection de la part de Sarutobi-sensei et Jiraiya!). L’équipe était complémentaire, et en dépit de nos querelles incessantes, nous nous aimions, dans le fond, comme on aime rarement dans une vie. Agés d’à peine une dizaine d’année, nous étions déjà prêt a donner nos vies les un pour les autres.





- Ka…Katsuyu ?
- Oui, je vous prie de retenir mon nom, Tsunade-sama, car nous nous reverrons souvent à l’avenir.
- Nous revoir ?
- Vous et moi sommes liées maintenant. A chaque fois que tu jugeras mon aide nécessaire, tu pourras faire appel à moi.
Je regardais la créature, perplexe…
- Euh…sans vouloir te vexer…A quoi peux-tu bien servir ?
Il fallait être réaliste. Katsuyu était une limace. Une limace d’un mètre de long, certes, mais une limace quand même. L’invocation laissa planer un court silence, certainement pour marquer son indignation polie.
- J’ai bien des talents cachés, Tsunade-sama, mais vous les découvrirez en temps voulu. Je suis simplement venue vous mettre en garde.
Je haussais les sourcils
- En garde ?
- Le…Le garçon qui a pactisé avec Manda.
- Orochimaru ?
- Manda est connu pour sa fourberie et sa malveillance. Qu’il laisse ce…cet Orochimaru faire appel à lui n’est pas anodin, Tsunade-sama.
Je ne savais que répondre. Oui, Orochimaru était désormais intimement lié à un serpent… mais je l’étais bien avec une limace, moi ! Autant dire que ce n’était pas vraiment le moment de se fier aux apparences ! Sans trop prêter attention aux propos de Katsuyu, je la remerciais pour l’avertissement et la congédiais.

*Si aujourd’hui j’écoute les conseils d’une limace, demain je me retrouve à faire la conversation à un couple de pigeons…*


J’ignorais, à l’époque, que le lien spirituel qui m’unissait à Katsuyu était si profond. Quand bien même je l’aurai su…Aurais-je changé quoi que ce soit ? Ou Orochimaru serait-il tout de même devenu le monstre d’arrogance et d’inhumanité qu’il est aujourd’hui ? Ce genre de question n’existe que pour faire naitre le doute, sans jamais trouver de réponse.

- Je…je suis désolé, Tsunade…

…
Tous les deux…non…Et Naoki qui les attends tous les jours aux portes… Je m’appuie contre la rambarde. D’ici, on voit tout le village. Moi, je distingue a peine les contours des bâtiments, des larmes pleins les yeux. Mes jambes semblent faites de coton, elles peinent a me maintenir debout. Mes parents, je ne les reverrai plus. Plus jamais.

Naoki…

Il vient d’avoir 7 ans, et je vais devoir lui dire que plus jamais il ne pourra serrer sa mère dans ses bras, ni sauter sur son père rentrant du travail pour qu’il lui apprenne des techniques. Pourquoi ? Pour cette stupide guerre ?! Ce n’est pas juste…Ce n’est pas juste !
Mes mains se resserrent autour de la rambarde, dont le métal plie en un grincement sourd. Sur le toit, le son de pas affolés retentissent. J’entends comme un bruit de fond. Jiraiya qui beugle pour savoir ce qui se passe, énervé de ne pas être « dans le coup ».
Sa colère n’est qu’un lointain bourdonnement a mes oreilles. Plus rien ne semble exister, si ce n’est cette souffrance terrifiante qui gronde en moi sans que je sache quoi faire.

Jiraiya veut venir vers moi, mais Sarutobi le retient par l’épaule. Il fait bien. Je ne suis plus moi-même. Orochimaru apparait à son tour sur le toit, et semble faire des remontrances à Jiraiya, a propos d’un départ en mission.
- Ta gueule Oro, c’est pas le moment de parler mission!
- Un ninja ne doit pas laisser ses émotions personnelles ressurgir sur son travail.
- Mais putain t’a pas de cœur ou qu…

- Jiraiya…Il a raison.
Ma voix était grave et distante, comme si ce n’était pas moi qui m’exprimais.
- Mais…
Je me retournais vers eux. Mon visage était crispé en un faux sourire, contredisant les larmes qui ne séchaient pas sur mes joues. Le ciel gronda, et la pluie s’empara du ciel. Alors que je m’approchais de mes deux coéquipiers, mes larmes s’étaient désormais mêlées à celles des cieux.

- C’est notre devoir de ninja de ne pas exprimer nos émotions.

Manque de pot pour Orochimaru, j’étais de congé, aujourd’hui. Le coup parti vite, et fort. Orochimaru n’eut pas le temps de comprendre, qu’il était au sol, tenant sa joue, perplexe. Jiraiya sembla sur le point de beugler une fois de plus, mais Sarutobi le retint, à nouveau. Les laissant seul sur ce foutu toit, je disparu, empruntant la porte de service.

*Merci, sensei…*

L’immense sentiment de solitude et de peine qui m’assaillit alors que je les sentais tout trois de plus en plus loin de moi ne me quitta plus, et ce pendant des mois.



Je ne sus que bien plus tard qu’aucun d’entre eux n’était parti en mission ce jour la. Et ce manquement aux règles me toucha, bien plus qu’il ne m’indigna.






Une période étrange de ma vie. Ce n’était pas le bonheur, mais ça s’en rapprochait. Avec Sarutobi-sensei, nous enchainions les missions, et je mettais un point d’honneur à les réussir au plus vite afin de rentrer m’occuper de mon petit frère. Cette guerre au début marqué par la disparition de mes parents faisait encore fureur, et je tenais à le préserver, autant que possible. Mais cette tête de mule était sacrément obstiné, et se fourrait toujours dans des situations pas possible, se rapprochant toujours plus du front. Cependant, il revenait, toujours. Blessé parfois, mentant toujours, mais fier, et vivant. C’est en cela que je reconnaissais en lui le digne héritier de mon grand-père. Le jour de son 11ème anniversaire, je décidais de lui faire part du plus beau cadeau que j’aurai pu lui faire…